C’est l’histoire d’une fillette qui observe son père jour après jour, et qui finit par s’interroger, « pourquoi pas moi ? ». Haltérophile averti, le père pratique cette discipline depuis l’âge de 18 ans. C’est dire combien la maison familiale en est imprégnée, et c’est tout naturellement que cette petite fille de 11 ans, emprunte la voie paternelle très ardue de l’haltérophilie.
En 1987, au détour d’une visite de l’équipe de France militaire d’haltérophilie à La Réunion, elle commence son initiation avec un objet ... domestique, ordinaire, ... un manche à balai ! Le chemin de cette pratique est très sécurisé, des méthodes d’apprentissage existent et elles doivent être respectées. Sinon le corps court un grand danger !
La voilà lancée, de 1992 à 2014, elle enchaîne les entraînements, les compétitions, collectionne les distinctions de tout ordre, des médailles, et surtout des médailles d’or, et cela en découvrant des dizaines de pays. Elle honore ainsi une promesse qu’elle s’est faite à elle-même, « s’émerveiller du monde, être autonome, et être première partout ».
Mais ce parcours est aussi un parcours sororal, Dolorès et Guita Marie Séverine l’accompagnent dans cette ascension, elles obtiennent également des médailles d’or lors de tournois divers. Elle rappelle avec émotion que c’est son père qui l’a faite.
En l’an 2000 elle participe aux JO de Sydney, grâce au soutien de la collectivité régionale. Elle sera la 1ère femme dans sa discipline à être distinguée. Pour accéder au plus haut niveau, elle a dû faire montre de caractère, de pugnacité, affronter le racisme et le sexisme sans jamais perdre sa dignité, en arborant très fièrement sur ses épaules le drapeau bleu blanc rouge de l’équipe de France pendant dix ans.
Aujourd’hui avec du recul, elle a le sentiment d’un accomplissement personnel certes, mais toujours avec un ancrage dans la réalité. Mère de trois enfants, elle leur transmet les valeurs de respect, d’ardeur à l’effort, de curiosité intellectuelle pour s’extraire du cocon réunionnais.
Même si elle ne pratique plus d’haltérophilie, elle œuvre à travers des associations, elle met en garde contre le dopage. Elle n’a de cesse de répéter que l’haltérophilie requiert une technique qui conjugue une gestuelle particulière et de la coordination, et bien sûr un mental de fer.
La Région Réunion est heureuse de distinguer Madame Sabrina Richard et de lui remettre le trophée de « Gardien de la Mémoire ». Elle incarnera encore pendant longtemps le sport de haut niveau au plan mondial.